Un homme fait un accident. Appelons-le Ajay. Ajay est gravement blessé, il est emmené au service des accidents et des urgences d'un hôpital, les médecins font de leur mieux pour le sauver mais il est trop tard. Il meurt. Dans le même hôpital, un jeune homme se prépare pour encore une autre séance de dialyse ; on l'appellera Alain, il fait la dialyse deux fois par semaine. Il sait que la dialyse n’est qu'une solution temporaire, mais il ne peut pas faire autrement.
Maintenant, imaginons cette scène différemment. Ajay est grièvement blessé, il est emmené au centre de survie le plus proche. Les médecins font de leur mieux mais ne parviennent pas à le sauver. Ils confirment la mort cérébrale et s’affairent à sauver ses organes. Parce qu’Ajay a une carte de donneur, une autre équipe commence à chercher un receveur approprié. Bientôt Alain reçoit un appel. Il est emmené à l'hôpital, il subit une intervention chirurgicale et se retrouve avec un rein fonctionnel. Il peut maintenant reprendre le travail, il peut maintenant mieux prendre soin de sa famille et mener une vie normale. Une vie est perdue, mais la qualité de vie d'une autre personne s’est améliorée. Une histoire de perte se transforme en une histoire d'espoir.
Beaucoup a été dit sur le commerce d'organes, sur le côté obscur de la transplantation. Et si pour une fois, on se concentrait sur le bon côté de la transplantation d’organes? Et si on parlait du but même de la transplantation d'organes ? Celui de sauver des vies et améliorer la vie de ceux qui, sinon, doivent recourir à la dialyse.
A la Fortis Clinique Darné le 22 mars 2017, le Dr Balbir Verma, Senior Consultant Minimally Invasive Urology & Kidney Transplant a discuté de la transplantation d'organes qui, selon lui, est une véritable course contre la montre.
« Tous les jours les Mauriciens ont besoin d'organes. Ils souffrent d'insuffisance rénale, d'insuffisance cardiaque ... Dans ce pays, le diabète est aussi très répandu et comme nous le savons, la maladie affecte plusieurs organes. Il y a beaucoup de demandes d'organes et nous n’arrivons pas à répondre à toutes ces demandes. À l'heure actuelle, nous pouvons seulement prendre les organes des membres de la famille et cela ne suffit pas ; les patients en souffrent, certains y laissent même la vie. »
Que faire ? Selon le docteur Verma, l'effort doit être collectif. Le gouvernement, la communauté médicale et le grand public… tout le monde doit s’y mettre. Avec le support gouvernement à travers des lois sans équivoque, il y aura moins de failles et moins d’abus. En ce moment, nos lois contiennent certaines zones d’ombre qui facilitent les maldonnes. Avec des lois non ambiguës, des termes comme la mort cérébrale ou le consentement pour le don d’organes seront aussi clairement définis évitant des complications sur le plan légal.
En ce qui concerne la communauté médicale, différentes personnes devront travailler sur les différents aspects d'un cas.
« Nous avons vu ce qui se passe quand tout le pouvoir est concentré entre les mains d'un seul individu», dit le médecin, «C'est pourquoi nous devons avoir des équipes séparées.»
Des équipes séparées, chacune composée de personnes intègres et qualifiées. Une équipe de médecins indépendants qui confirment la mort cérébrale, une autre équipe composée de sociologues, de psychologues, de personnes travaillant dans le milieu légal et de citoyens éminents pour obtenir le consentement de la famille du donneur, une équipe de récupération qui ne fait que prendre et conserver les organes, un chirurgien qui s’occupe de l’opération sans se préoccuper de l’identité du donneur ou du receveur... Ces différentes équipes travaillent de façon complémentaire mais séparément et veillent à ce qu'il n'y ait pas d'échange direct entre les familles du donneur et du receveur. Ainsi, les droits du donneur et du receveur sont respectés.
La sensibilisation du grand public est extrêmement importante. Nous pourrions avoir les meilleures lois, les meilleures équipes médicales et la meilleure infrastructure, mais tout cela ne servira pas à grand-chose si nous, les Mauriciens, ne voulons pas sauver une vie en faisant don de nos organes. Les mythes concernant le don d'organes doivent être éradiqués, la sensibilisation et la solidarité doivent être inculquées. Moi, vous, un de nos amis, un de nos parents ... tout le monde peut avoir besoin d'un organe demain. Presque tout le monde a aussi la capacité de sauver une vie. Dans d'autres pays, les gens reçoivent des cartes de donneurs ; cartes qui spécifient l’engagement d'une personne d’offrir ses organes pour la transplantation en cas de décès. Selon le Dr Verma, cela est bel et bien possible à Maurice:
« Maurice a le potentiel pour devenir un ‘hub’ de transplantation. Nous avons de bons soins de santé de base, les facilités de transport sont bonnes, la communication est aussi bonne... Nous devons continuer à travailler sur l'infrastructure, mettre en place des centres de soutien de vie ... mais c'est faisable. L'Inde a une population de 130 millions et la transplantation d’organes cadavérique est une réalité là-bas. Alors, pourquoi pas ici ? »
Au cours de cette conférence à la Fortis Clinique Darné, le Dr Balbir Verma nous a demandé de réfléchir. Et d’agir. Parce que nous avons tous la capacité de sauver une vie. Faisons-le ensemble. Commençons dès maintenant.