Il y aurait moins de fumeurs parmi les patients Covid-19
C’est ce que démontrent les données de nombreux pays. Une étude britannique a montré que la proportion de fumeurs parmi les patients souffrant du COVID-19 n’était que de 5 %, alors que l’on compte 14,4 % de fumeurs au Royaume-Uni. Une étude similaire réalisée en Chine et publiée dans le New England Journal of Medicine, révèle que sur 1 000 patients Covid-19, environ 13 % d’entre eux étaient des fumeurs, alors que la proportion de fumeurs en Chine est d’environ 28 %.
En France, selon l’enquête menée par l’AP-HP (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), sur les 11 000 patients Covid-19 hospitalisés, 8,5% étaient des fumeurs réguliers, alors que, dans la population générale, on recense 25,4% de fumeurs. On constate la même tendance dans les ratios fumeurs/non-fumeurs dans les hôpitaux ailleurs qu’à Paris. Comment l’expliquer ? C’est ce qu’a voulu savoir les chercheurs de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. Les résultats de cette étude ont été publiés le 21 avril 2020
Ce que montre cette étude
Cette étude a été menée sur 2 groupes: 343 patients hospitalisés traités pour COVID-19 du 28 février au 30 mars, et 139 patients externes traités du 23 mars au 9 avril. Pour chaque groupe, les chercheurs ont comparé le nombre de fumeurs malades avec la proportion de fumeurs dans la population française. 4,4 % des patients hospitalisés et 5,3 % des patients Covid-19 en consultation externe étaient des fumeurs.
D’autre part, cette étude était une enquête transversale dans laquelle les chercheurs ont évalué à la fois les risques (fumeur quotidien ou non) et les conséquences sur la maladie (formes graves ou non). Selon les médecins, ces résultats prouvent deux choses:
- il y a peu de fumeurs parmi les malades du Covid, soit 80% de moins que dans la population générale de même âge et de même sexe.
- peu de fumeurs quotidiens ont développé des infections graves par rapport à la population générale.
Selon les scientifiques, le mécanisme de protection ne vient pas de la cigarette mais de l’un de ces ingrédients actifs : la nicotine.
La nicotine bloquerait le virus au niveau du cerveau
Le SRAS-CoV-2, le virus qui provoque la COVID-19, pénètre dans les cellules humaines en se fixant sur des récepteurs protéiques appelés ACE2, qui se trouvent à la surface de certaines cellules. Certains de ces récepteurs réagissent à la nicotine ainsi qu’à une substance chimique appelée acétylcholine. D’où leur nom : «récepteur nicotinique de l’acétylcholine ». On les trouve dans certaines parties du système nerveux, des muscles et de certains tissus de l’organisme.
Les chercheurs ont émis l’hypothèse que la nicotine fixée sur ces récepteurs, empêche ainsi le virus de s’y accrocher. Ce qui réduit potentiellement non seulement la progression du virus dans l’organisme mais aussi l’aggravation des symptômes. Pour l’instant ce n’est qu’une hypothèse qui doit être vérifiée. C’est pourquoi, les chercheurs de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière vont procéder à 3 essais complémentaires en administrant à des dosages différents des patchs nicotiniques à des volontaires.
En attendant, fumer n’est pas une solution
Si vous êtes non fumeur, inutile de vous jeter sur les cigarettes ou sur les patchs nicotiniques. La prise de nicotine n’est en aucun cas inoffensive, car il s’agit d’une substance toxique. D’ailleurs, si vous êtes non fumeur et que vous mettez un patch à la nicotine, vomissements, étourdissements et malaise, entre autres, vous attendent. Des formes suffisamment sévères pour vous faire passer l’envie de recommencer !
Les médecins insistent sur le fait que les inconvénients du tabagisme dépassent de loin les effets protecteurs potentiels de la nicotine. En plus de ses effets négatifs avérés sur la santé, le tabac provoque certains types de comorbidités qui augmentent la vulnérabilité au Covid-19. Il peut entraîner l’emphysème, la bronchite chronique et le cancer, autant de pathologies qui accroit le risque de décès et de maladie grave due à un coronavirus.
En outre, l’Organisation mondiale de la santé rappelle que le tabac tue plus de 8 millions de personnes chaque année. Ce qui rend le taux de mortalité lié au tabagisme nettement plus élevé que le taux actuel de mortalité due au nouveau coronavirus. En clair, le tabac tue plus qu’il ne protège et il tue plus de personnes que le Covid-19. Non, fumer, ce n’est pas une solution.