« Ladrog pa guet figir ». Comme le Sida ou le cancer, la drogue ne choisit pas ses adeptes. Clara, 16 ans, en sait quelque chose. Élève dans un lycée, elle constate depuis plusieurs mois déjà les ravages de la drogue synthétique chez certains ados de son établissement scolaire : « Ils en fument vis-à-vis de la porte du collège. Sans que cela ne choque personne finalement. Tout le monde le sait, mais personne n’en parle ».
Comme une omerta du silence. Ne rien dire face à des jeunes de 14 à 18 ans qui se remplissent les poumons de produits chimiques, toxiques et illégaux. Pour avoir vu les effets de ces substances inhalées par ses amis collégiens, Clara dénonce, même en mode anonyme :
« L’effet que cela produit sur eux est terrible. Ils vomissent, certains tombent sans connaissance, d’autres sont comme des zombies. Pour avoir déjà consommé de l’herbe, je sais l’effet que cela peut faire sur nous. Mais là, c’est pire. Ils ne contrôlent plus rien et perdent tous leur moyens ».
Il semblerait donc que les drogues synthétiques aient détrôné l’herbe dans certains collèges. Le prix abordable y serait certainement pour quelque chose, comme nous l’explique Clara : « Un joint naturel coûte entre Rs 900 à Rs 1200 le gramme. Par contre, une dose de drogue synthétique revient à Rs 250/Rs 300 l’unité, ce qui est nettement plus abordable pour les jeunes collégiens ».
Et où trouvent-ils cet argent ?
« Ils demandent à leurs parents, probablement », nous rétorque la jeune lycéenne. Argent de poche ou autres, tous les moyens sont bons pour se procurer sa dope quotidienne. Même les moyens subversifs, on l’imagine aussi…
A savoir qu’au sein même de cet établissement se retrouvent dealers et consommateurs : « Certains en vendent et d’autres en consomment. C’est un trafic déjà bien établi, bien calculé ». A ne pas croire surtout que cela ne concerne que les garçons, car comme le soulignait récemment le travailleur social Danny Philippe de l’ONG CUT, la féminisation de la consommation de la drogue synthétique a pris une ampleur certaine au cours de ces derniers mois. Clara nous le confirme d’ailleurs avec force :
« Il m’est arrivé de voir des filles défoncées aux drogues synthétiques juste avant des contrôles, voire avant des examens importants ». Un peu comme si ces drogues étaient des alliées pour garder le contrôle sur tout. Tout en ne contrôlant finalement rien ».
Les drogues synthétiques gagnent dangereusement du terrain. Les ados succombent à ce nouveau chant des sirènes, tandis que leurs amis assistent impuissants à leur déchéance. Clara n’en revient toujours pas que les responsables de son collège n’aient rien vu jusqu’ici :
« Et pourtant on nous parle en classe de la drogue et de la prévention. Mais rien n’est fait par rapport à ce qui se passe juste devant chez nous. Cela fait peur…»
Pourquoi ne pas dénoncer dans ce cas, même anonymement ? Silence. Réflexion... « Oui il faudrait le faire. Ce sera important pour éviter que d’autres ne tombent dans ce piège. Mais en même temps, c’est difficile de faire ce premier pas. Mais oui, finalement il faudrait le faire… »
Les drogues synthétiques font des ravages partout et toutes les couches sociales sont concernées. Malheureusement, pour beaucoup, ça commence dans les collèges. Et les jeunes collégiens l’apprennent à leurs dépens. Quand il est déjà trop tard…