Comme plusieurs autres jeunes, Terry a été motivé par la curiosité.
« Tout le monde parlait de la drogue synthétique, c’était nouveau, c’était puissant… J’ai voulu essayer».
À cette époque, Terry a 19 ans. Tous ses amis en prennent, il décide de faire comme eux. Est-il conscient du danger ? « Oui, je savais que c’était dangereux mais bon, à cet instant-là on ne pense qu’à la sensation, on veut juste avoir notre nisa, on ne pense à rien d’autre. »
Il n’a pas peur aussi parce qu’on l’informe que les effets ne durent que trente minutes. Durent-ils vraiment trente minutes ? « Oui mais pendant ces trente minutes, c’est l’enfer ! » Palpitations, perte de mémoire temporaire, tremblements sont autant d’effets qu’il ressent.
« Si enn dimounn ena problem leker, fasil so leker arete ». Pourquoi tant d’effets virulents? Que peuvent bien contenir ces drogues ? « Ayo ils mélangent n’importe quoi, des insecticides, du poison pour les rats… ».
Malgré les effets négatifs, Terry renouvèle l’expérience. C’est justement le sentiment d’avoir frôlé et esquivé le danger qui le pousse à recommencer. « Après c’est normal, tous les amis s’asseyent, on fume notre truc, ça fait partie du processus de socialisation… ».
Il renouvèle l’expérience trois ou quatre fois et devient accro. Il fume de la drogue synthétique tous les jours, souvent plusieurs fois par jour. « Dès que je terminais un joint, j’allumais un autre ». Des fois, le jeune marin part travailler sous l’effet de la drogue. « Je fumais mon truc ensuite je partais travailler ».
Travailler à cette époque-là demande toutefois un effort supplémentaire. Il s’affaiblit, il maigrit, ses joues deviennent creuses.
Et la famille dans tout ça ?
« Oui, ils étaient au courant, ils me demandaient d’arrêter, mais mo latet ti dir ».
Pourtant, il fait une expérience qui le convainc d’arrêter. Son corps s’étant habitué aux petites doses, il décide un jour de prendre une plus grande dose d’une drogue plus forte. Il consomme du bat dan latet d’une valeur de Rs. 500.
Pendant trente minutes, il vit un véritable cauchemar :
« Mon cœur battait tellement vite, je ne comprenais rien, j’ai fini par perdre connaissance ».
Il est heureusement accompagné d’un ami qui arrive à s’occuper de lui. Cela demeure néanmoins une expérience traumatisante. « Ayo je préfère boire dix bouteilles de rhum » dit-il avec un petit rire avant d’ajouter qu’il aurait pu mourir. Justement, des gens sont-ils morts à cause de la drogue synthétique ? « Ah oui, beaucoup ! Moi-même je connais deux personnes qui sont mortes à Port-Louis ».
Il s’agit là de substances mortelles qui restent néanmoins très accessibles. Dans quelques banlieues de la capitale, c’est comme au marché :
chaque dealer vante les mérites de son produit. « Zot vini, zot dir pa aste laba, aste kot mwa, kot mwa pli bon ». En sus d’être accessibles, ces produits ne coûtent pas chers ; ils se vendent à partir de Rs. 100. La drogue synthétique coûte peu mais se vend très bien. « Chez certains dealers, les gens font la queue depuis cinq heures du matin. Imaginez combien d’argent cela rapporte !» Il précise que les clients sont souvent très jeunes. « Beaucoup n’ont que douze ou treize ans. Il y a certains jeunes qui agissent par méchanceté ; ils font passer de la drogue synthétique pour du cannabis et bernent leurs camarades. D’autres ignorent les répercussions de la drogue synthétique et tombent dans le piège ».
Une fois tombés, peut-on facilement sortir de ce piège ?
« Non ce n’est pas facile. Cela demande de la volonté… » Terry peut heureusement compter sur le soutien d’un ami qui essaie lui aussi d’en finir avec la drogue synthétique. Ils connaissent des moments de doutes mais se soutiennent mutuellement.
Ils réussissent à mettre fin à leur dépendance. « Il y a des fois où des gens venaient me voir pour m’offrir de la drogue synthétique. Je prenais et je jetais ».
Maintenant qu’il a pu s’en sortir, Terry veut faire passer message aux plus jeunes.
« Surtout ne tombez pas dans ce piège-là. Vos parents vous donnent de l’argent, n’utilisez pas cet argent pour acheter de la drogue synthétique. Achetez plutôt de la nourriture, des choses qui nourrissent. Prenez soins de vous ».
Craignez - vous une rechute Terry ? « Ah ça jamais ! Je suis victorieux maintenant ! »
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