Son fils Emmanuel est la prunelle de ses yeux. Pour avoir cet enfant, Gino a beaucoup prié, beaucoup attendu. Un an, deux ans, trois ans. Pas d’enfants. Sa femme et lui persévèrent. Cinq, six, sept ans. Ils commencent à se résigner. Ils y a des moments où c’est difficile. Des fois, ils n’ont pas de courage mais la foi est toujours là. Huit, neuf, dix ans. Ils se demandent si leur maison retentira un jour des pleurs d’un bébé. Dix, onze, douze, treize ans. Ils commencent à abandonner. Ils considèrent l’adoption. C’est un abandon sans amertume. Après dix-neuf ans, ils se disent que Dieu a peut-être d’autres desseins ; ils ne s’y opposeront pas. Ils comprennent que l’amour est inconditionnel, que tous les enfants sont dignes d’amour. C’est bon, ils se disent ; ils adopteront un enfant.
Puis arrive l’imprévisible. Son épouse tombe enceinte. Et Gino le sait, juste comme ça. Sans faire de test, il le sait, il le sent :
« On a fait des traitements et des tests pendant des années. Même les médecins n’arrivaient pas à comprendre d’où venait le problème. On a continué les traitements, ma femme a subi une chirurgie à l’hôpital. Nous faisions tout ce que nous conseillaient les médecins mais nous nous étions déjà résignés. Mais là je savais ! Je ne sais pas comment mais je savais. Elle n’avait pas ses règles et je lui ai dit ‘To enceinte twa !’ Même avant de faire le test de grossesse je disais à tout le monde que j’allais être papa. (Rires) »
L’intuition ? Dieu ? Un test de grossesse vient confirmer ce que lui disait son intuition. Oui un enfant ; après 19 longues années de patience. Cela confirme que tout est possible, que parfois il suffit d’attendre, de garder la foi. Parents, enfin. Quelle joie inexplicable ! Gino se dit qu’il aimerait bien avoir un fils mais là, ce qui compte le plus, c’est qu’il sera papa. Oui, leur maison retentira finalement des pleurs de bébé.
La grossesse se passe bien. L’accouchement se fait par césarienne. La veille, ils prient, ils espèrent. Après l’accouchement, le médecin lui tend l’enfant. C’est un garçon ; comme il l’espérait.
« Dokter inn dir mwa ‘ala ou garson’. Et là, mon bébé a ouvert les petits yeux pour me regarder ! C’était magique ! Cet enfant était un enfant miracle, un vrai cadeau de Dieu. C’est la raison pour laquelle nous l’avons appelé Emmanuel. C’est un nom biblique, c’est le nom de Jésus. »
Finalement, un enfant. Le leur. Un petit être qui leur apporte plus de joie, plus de sagesse. Maintenant qu’ils ont leur enfant, abandonnent-ils l’idée d’adopter ? Non. Parce qu’ils réalisent que pour grandir un enfant, il ne faut pas beaucoup d’argent ou de connaissances. Ce qu’il faut le plus ? De l’amour. Et de l’amour, ils en ont. Adopter un enfant, l’aimer. Juste comme ça ; parce qu’il le mérite. Parce que chaque être humain est digne d’amour.
Pourtant, à cet amour, tout le monde n’a pas accès. Cela, Gino l’a compris lorsqu’il a créé une ONG pour venir en aide aux enfants défavorisés. Cette ONG, La Colombe, s’occupe des jeunes de Batterie Cassée. Ces jeunes sont âgés de 4 à 16 ans et la plupart viennent des poches de pauvreté, sont maltraités et négligés.
« C’est dommage de voir des enfants maltraités. Un être humain est un être cher ; il faut le choyer. Il faut, dès le départ, pouvoir le mettre sur la bonne voie. Parce que l’enfant n’y est pour rien. Lorsque je vois souffrir ces enfants, j’ai envie de faire quelque chose. Je fais je que je peux à travers mon ONG. Je n’ai pas les moyens pour adopter tous les enfants défavorisés mais je peux adopter un enfant et lui donner tout l’amour qu’il mérite. »
Peu importe le milieu d’où vient l’enfant, peu importe son appartenance ethnique… Gino, sa femme et le petit Emmanuel aujourd’hui âgé de 4 ans sont prêts à accueillir un nouveau membre dans la famille. Ce deuxième enfant sera-t-il une fille ou un garçon ?
« Emmanuel veut avoir une petite sœur. Donc je pense que ce sera une fille. (Rires) »
Oublions un peu les critiques, mettons de côté les nouvelles macabres. Oui, des choses terribles se passent dans le pays. Mais dans ce pays il y a aussi des gens comme Gino, des personnes ordinaires qui sont aimantes, fortes, généreuses. Donnons aussi la parole à ces personnes. Utilisons-les comme exemple. Inspirons-nous de leur amour et de leur générosité.